Cette année le printemps reprend ses droits. Confinement oblige, nos déplacements sont limités. Soudain le ciel s’éclaircit, l’air semble plus pur, les bruits s’estompent, nous sommes surpris d’entendre les oiseaux! La planète respire mieux, la nature reprend sa place.
Est-ce un effet bénéfique de cette crise sanitaire? Certainement à court terme, elle offre un répit au climat et à la nature.
Toutefois, il est intéressant de comprendre que cette pandémie trouve son origine dans notre gestion de la biodiversité et du climat qui sont très étroitement liés.
Un article de Philippe Grandcolas et Jean-Lou Justine du Museum d’Histoire Naturelle paru dans Sciences & Vie le 28 mars rappellent que 100 milliards d’hectares de forêt tropicale ont été détruits entre 1980 et 2000, mettant des populations en contact avec des animaux sauvages qui vivaient cantonnés dans ces espaces préservés, et avec eux de nouveaux agents pathogènes. Le commerce de ces animaux exotiques qui s’est développé a fait voyager des agents à travers le monde.
Les auteurs précisent que » plus des deux tiers des maladies émergentes sont des zoonoses, c’est-à-dire des maladies dont le réservoir de l’agent infectieux est un animal ; parmi ces zoonoses, la majorité provient d’animaux sauvages ».
C’est la raison pour laquelle l’OMS a lancé la démarche « One Health ».
Cette approche « Un Monde, Une Santé » a pour objectif d’organiser les ressources politiques, législatives et de recherche autour de trois piliers: la sécurité sanitaire des aliments, la lutte contre les zoonoses et de la lutte contre la résistance aux antibiotiques. La finalité est évidemment de remettre la biodiversité au coeur de cet écosystème afin qu’elle soit prise en compte de façon cohérente et raisonnée.
Ce qui se passe à travers le monde actuellement, et notamment dans les pays du Nord, doit nous amener enfin à repenser ce qui se passe dans les pays du Sud. Cela pose pour ces pays la question de pérennité et santé de leur économie, basée sur quels actifs? Où commence le bien d’un état et le bien commun de l’humanité? Quel juste prix chacun doit payer pour préserver un bien commun pour l’humanité?
.Ces questions sont importantes car pour une fois face à la « guerre » que nous menons l’Humain a été mis au premier plan. Comme le précise Boris Cyrulnik dans La Provence Santé du 30 mars » Maintenant, on considère que la personne est une valeur prioritaire. Les femmes et les hommes ne veulent plus se soumettre aux guerres. Mais cette nouvelle culture qui valorise l’individu est aussi à la source de la catastrophe. C’est au nom de la performance qu’on a développé des formes d’élevage intensif qui favorisent la naissance de virus. La course technologique, aux transports, le commerce international, la globalisation ont, ensuite, permis l’extension du virus sur toute la planète« .
On voit apparaître une nouvelle hiérarchie des valeurs morales qui va challenger notre modèle établi. Nous sommes nombreux à nous demander comment sera notre monde APRES. Il y a ceux qui pensent que rien ne changera et que la vie reprendra comme avant car les politiques, le « système » ne sauront pas ou ne voudront pas le faire changer. Parce que spontanément, nous nous tournerons vers les recettes connues, celles qui nous sont familières et qui sont nos repères sans savoir si elles sont adaptées à cette nouvelle situation.
Et puis, il y a ceux qui se disent que des choses doivent changer, qu’on ne peut pas fermer les yeux sur cette réalité, que chacun est acteur et doit contribuer car la société c’est nous tous. C’est ce que pense Boris Cyrulnik « À chaque épidémie, ou catastrophe naturelle, il y a eu changement culturel. Après le trauma, on est obligé de découvrir de nouvelles règles, de nouvelles manières de vivre ensemble « .
Quelle sera la place du local? Quel prix accepterons-nous de payer pour cela? Comment prioriserons-nous nos besoins à satisfaire? Comment cela impactera-t-il notre modèle économique? Quelle valeur serons-nous en mesure de créer différemment?….. Pour réflexion….
Articles de référence à découvrir:
https://www.science-et-vie.com/paroles-d-experts/covid-19-ou-la-pandemie-dune-biodiversite-maltraitee-55073
https://www.who.int/features/qa/one-health/fr/
https://www.laprovence.com/article/edition-marseille/5947700/boris-cyrulnik-il-y-aura-des-transformations-profondes.html